mardi 2 décembre 2008

La jeunesse noire du Liban

« Ce que tu ne comprends pas, c’est que nous (les libanais) avons grandi dans l’idée de nous expatrier pour fuir l’instabilité, la guerre et l’intégrisme qui gangrènent notre pays… toi tu es plutôt dans l’optique d’aller ailleurs, et encore ce n’est pas sûr, pour gagner plus ». Ce sont là les propos d’un chrétien libanais de 17 ans.






Le Liban n’a aujourd’hui plus aucun avenir pour la grande majorité des chrétiens, les jeunes cerveaux fuient en direction des Etats Unis ou de l’Europe, et ceux qui restent le font pour leurs parents. Certains optimistes croient encore en une stabilité prochaine : « bien sûr, d’ici 30 ans tout ira mieux ! ».

L’accession au pouvoir du nouveau président Michel Sleiman avait pourtant, dans un premier temps, redonné confiance aux libanais, confiance qui s’étiola rapidement face aux difficultés rencontrées. Le gouvernement a en effet mis deux mois à se constituer. De plus, la Déclaration Ministérielle, sorte de feuille de route du gouvernement, a été à de nombreuses reprises reformulée, débattue, contestée durant l’été 2008, faisant perdre tout crédit aux dirigeants libanais. Cette déclaration mettait en lumière certains sujets sensibles, comme les armes du Hezbollah, milice chiite qui se comporte comme un Etat dans l’Etat et fait régner sa loi dans le sud du pays. Ce pion de l’Iran a été l’initiateur du conflit avec Israël (été 2006), et a pour projet de faire du Liban un pays musulman. Ces divers problèmes expliquent une partie des inquiétudes du peuple chrétien.
Sur place, on ressent également un profond raz le bol à l’égard du monde politique. Les dirigeants de partis sont considérés comme des profiteurs qui détournent des fonds, s’enrichissent eux et leur famille, et s’embourbent dans d’éternels règlements de compte. Ces dirigeants ont en effet tous connu la guerre civile, et n’arrivent pas à dépasser leurs rancoeurs passées et à se dire que désormais l’objectif est national et non plus communautaire. La vision d’un Liban pluriculturel et uni n’est toujours pas d’actualité.
On note cependant plusieurs tentatives de rapprochement entre communauté, qu’il faut saluer et encourager. L’uléma Sayyed Mohammed Hussein Fdlallah (chiite) est par exemple prêt à se rapprocher des sunnites. Le Liban est constitué de 18 communautés religieuses, cette diversité culturelle, au lieu d’être une force, est un frein au développement du pays et fait perdre de plus en plus de crédit au Liban en tant que démocratie. Comment en effet expliquer le tapage médiatique orchestré par le Hezbollah pour récupérer des prisonniers faits par Israël, quand on sait que l’un d’eux est Samir Kantar ? Pourquoi un pays qui se veut libre, tourné vers le progrès, démocratique, fête en héro un monstre qui a fracassé la tête d’une fillette de 3 ans sous prétexte qu’elle était juive ? D’autre part, il convient de remarquer que le Hezbollah n’a réclamé absolument aucun prisonnier détenu par la Syrie… Il est en effet plus intelligent de critiquer « l’ennemi » du monde arabe et de le désigner comme seul fautif plutôt que de réveiller de vieux souvenirs, surtout quand il s’agit de la Syrie, pays qui a occupé le Liban pendant un certain temps.
L’hébétude des jeunes chrétiens libanais est tout à fait compréhensible, leur pays n’a pas les moyens de les retenir, il ne leur offre aucune perspective d’avenir. Il y a un mois environ, un avion de l’armée libanaise a été abattu par le Hezbollah, celui-ci survolait une zone contrôlée par la milice…

Y.S.

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